La France, ses fromages, son vin, sa culture… et ses innombrables taxes sur presque tout et n’importe quoi. Taxe sur les remontées mécaniques, sur les pylônes, les photocopieurs, la farine… La liste est longue comme un discours de Daenerys. On en vient presque à comprendre pourquoi les sondages nous classent régulièrement premiers dans la catégorie des pays qui râlent le plus. Il n’empêche, comme on va le voir dans cet article, qu’on ne saura jamais à quoi on a échappé. Nos ancêtres les contribuables ne devaient pas rigoler tous les jours. Parce que l’impôt, il vaut parfois mieux en rire, TacoTax vous a concocté un petit best of des anecdotes fiscales les plus saugrenues.
Ne tirez pas sur le pianiste
Allez dire ça au fisc. La France a instauré en 1893 un impôt sur les pianos. L’État partait du principe que quiconque était assez fortuné pour s’offrir un piano pouvait bien faire un petit effort de trésorerie supplémentaire. L’instrument était alors très à la mode, et les fraudeurs avaient plutôt intérêt à jouer les fenêtres fermées. Une exonération de cette taxe était généreusement accordée aux maîtres à danser, aux musiciens professionnels et… aux marchands de vin (la France, terre de contrastes). Le montant ? 10 francs par piano. Avec environ 500 000 pianos en circulation à l’époque, l’impôt a rapporté 5 millions en 1893. L’Etat l’a abrogé au début du XXe siècle.
Baby boom
Envie d’attendre avant de faire un enfant ? Estimez-vous heureux. En 1938, on ne plaisantait pas avec la natalité. Les couples qui convolaient en justes noces étaient vivement encouragés à garder le lit. Ils disposaient de deux ans montre en main pour concevoir un enfant. Le dépassement de ce délai entraînait une pénalité sous forme de « taxe de compensation familiale » mise en place par le gouvernement Daladier pour booster la croissance.
Salade de fruits jolie, jolie…
Un impôt qui ne va pas plaire aux adeptes des 5 fruits et légumes par jour. En France, la fiscalité se glisse jusque dans le panier des ménagères qui font leur marché. Fruits et légumes produits localement sont taxés. Là où les maraîchers rient jaune, c’est que les fruits et légumes produits dans d’autres pays européens, eux, ne le sont pas. Courtoisie de l’Union européenne pour soutenir la concurrence. En bref, vous payez plus d’impôts quand vous achetez des fraises de Plougastel que des clémentines d’Espagne.
Un impôt alambiqué
La Prohibition des années 1930 aux États-Unis, ça vous dit quelque chose ? Et bien prems ! comme on dit dans les Internets. Après avoir essuyé une sévère défaite contre la Prusse (mais si, souvenez-vous, c’était en 1870), le gouvernement de Napoléon III a estimé qu’il était grand temps de remettre la morale publique au goût du jour. S’ensuivit l’institution d’une taxe sur les spiritueux.
Un impôt pas du tout au goût des bouilleurs de cru, ces marchands ambulants d’eau-de-vie, les seuls habilités à posséder chez eux un alambic pour leur consommation personnelle. Craignant de perdre ce privilège, ils en appelèrent à leurs dirigeants. Ce fut la République qui trouva la solution en 1900 en décidant de cantonner l’impôt à son rôle financier, sans intervenir dans la consommation.
Prison break
Les lettres de relance du fisc vous effraient ? Les contribuables qui vivaient au XVIIe siècle avaient eux de bonnes raisons d’être effrayés. S’ils ne payaient pas la taille (l’impôt versé par les paysans en échange de la protection de leur seigneur), ils étaient tout bonnement jetés en prison. Une solution dissuasive, bien qu’un peu extrême, trouvée par le surintendant des Finances du cardinal Mazarin pour remplir les caisses de l’État.
Résultat ? 23 000 hommes jetés sans ménagement en prison. Pensez-y, la prochaine fois que l’envie vous prendra de vous plaindre des 10% de majoration pour déclaration rendue en retard.
Coquillages et crustacés
Vous aimez les fruits de mer ? L’État aussi. À tel point que, fidèle à ses habitudes, il en a fait un impôt : 2% de taxe sur les poissons, crustacés, mollusques et autres créatures marines comestibles. On nage en plein délire, estiment les défenseurs des programmes de nutrition, alors que la consommation hebdomadaire de ces aliments est recommandée pour la santé. D’autant plus que les huîtres et les moules en sont exonérées. Un impôt qui a fini par plonger en 2012.
Les bras ballants
En 1995, l’écrivain tchèque Milan Kundera publiait « La lenteur », une ode aux vertus de la lenteur. Sans doute ne savait-il pas qu’en 1948, un tel récit aurait été censuré. Au sortir de la guerre, il fallait renflouer les caisses de l’État par tous les moyens. La toute jeune direction générale des impôts eut alors l’idée de taxer les oisifs. Toute personne de sexe masculin de moins de 60 ans surprise les mains dans les poches (plus exactement « incapable de justifier une activité professionnelle pouvant subvenir à ses besoins » sic) en 1947 serait mise à l’amende. Et pas des moindres : 50 000 francs. Voilà qui donne envie de se mettre au travail.
Ironie du sort : ce impôt n’a jamais vu le jour, du fait de la difficulté de définir la notion d’activité professionnelle. Ça demandait trop de travail, paraît-il…
Bonus : l’impôt rasoir en Russie
L’Ex-URSS n’est pas en reste lorsqu’il s’agit d’accueillir la coupe du monde d’inventer des taxes insolites. Désireux de moderniser son pays, le tsar Pierre Ier dit le Grand (1672-1725) promulgua l’impôt sur les barbus en 1704. […] Tout individu affublé d’une barbe devait en payer le prix : un demi-kopeck de péage à l’entrée et à la sortie de chaque ville pour les paysans et jusqu’à 100 roubles par an pour la noblesse. Il ne faisait pas bon être un hipster à l’époque…
La décision scandalisa le clergé. L’Église orthodoxe russe n’admettait pas que le Créateur (et ses disciples) puisse être imberbe. Pierre Ier préféra les exonérer. Aujourd’hui encore, les popes abordent de superbes barbes emmêlées.